Plan :
Introduction
1) Questions de sources
2) Accusations contre le Swâmî
a) Un mystificateur ?
b) Un spirite ?
c) Un pro-maçon ?
d) Un anti-catholique ?
Conclusion
P. S.
Introduction
« Le Swâmî Narad Mani » est la signature sous laquelle a été publiée une étude historique sur la Société Théosophique, intitulée Le Baptême de Lumière (sous-titre : Notes pour servir à l’Histoire de la Société dite Théosophique), étude inachevée, originellement parue dans La France Antimaçonnique, du 19 octobre 1911 au 29 février 1912. On peut consulter cette étude, par exemple ici :
Une réédition est parue en 2003 aux éditions Archè, à la suite de laquelle se trouve une postface (signée L. T., initiales de Laszlo Toth, le directeur des éditions Archè) qui se veut très incisive contre le Swâmî Narad Mani, Abel Clarin de la Rive, René Guénon, etc.
À première vue, cette hostilité, lourde et insistante jusqu’à l’absurde, est vraiment étonnante, et jure avec l’étude elle-même, introduite dans La France Antimaçonnique par Clarin de la Rive de façon assez originale et amusante, puis déroulant un récit qui arrive à être assez vivant malgré son caractère documentaire. Son contenu, qui comporte certes quelques défauts d’expression et certaines fantaisies sur des points annexes, constitue un exposé sérieux et dense sur la Société Théosophique, s’appuyant sur un grand nombre d’informations sourcées, ce qui en fait un précurseur du Théosophisme, étude bien plus conséquente que René Guénon publiera en 1921.
1) Questions de sources
Le Théosophisme contient une grande partie du contenu de cette étude, ce qui a fait dire à certains que le Swâmî était en réalité René Guénon. Celui-ci répond lui-même dans la correspondance suivante :
J’ai reçu ces jours derniers une lettre de M. de Frémond, qui me parle de votre correspondance au sujet de la France Antimaçonnique. À ce sujet, je ne sais pas s’il y a quelque chose d’antérieur à l’année 1911 ; en tout cas, ce serait peu important. Les « lettres d’un gnostique… », etc., ne sont pas de moi, non plus que les documents sur la Société Théosophique ; le Swâmî Narad Mani a d’ailleurs existé, car je l’ai connu, mais je pense que, dans la circonstance, il n’a fait que donner sa signature ; en tout cas, je ne suis pour rien là-dedans.
René Guénon à Luc Benoist, 2 juillet 1934.
Dans la postface susnommée, cette citation est fournie. Si l’amalgame n’est pas fait trop grossièrement entre Guénon et le Swâmî, tous les efforts sont cependant fait pour les lier.
D’abord, il est avancé que l’étude de ce dernier serait « sinon la source principale, du moins le point de départ de René Guénon pour la rédaction de son livre Le Théosophisme, Histoire d’une pseudo-religion. » (p. 167). Cette thèse de l’emprunt, expédient habituel des esclaves de la « méthode historique », est assez répandue. Pourtant, ce n’est pas ce que Guénon indique, à la fin des notes additionnelles du Théosophisme (notes ajoutées dans la version de 1928) : « l’idée de ce livre nous avait été depuis longtemps suggérée par des Hindous, qui nous ont d’ailleurs fourni une partie de notre documentation ». L’auteur du Baptême de Lumière a-t-il quoi que ce soit d’un Hindou, à part le nom d’emprunt avec lequel il signe ? Il n’y a aucune preuve allant dans ce sens ; au contraire, il a tout d’un occidental dans son expression et dans sa façon de penser : sa « Maçonnerie Hindoue » par exemple (p. 87 du livre ; p. 540 de la revue, 25e année, no 50), et sa description des organisations hindoues en général ; d’autre part il renvoie sans réserve au livre du Dr Gibier, Le Spiritisme ou Fakirisme occidental : « Paul Gibier a laissé deux ouvrages intéressants : Spiritisme, analyse des choses, et le Fakirisme oriental » (en note, p. 70 du livre ; p. 533 de la revue, 25e année, no 49) ; livre qui d’après Guénon « contient, en ce qui concerne l’Inde, de véritables énormités » (L’Erreur spirite, 1re partie, ch. IV).
Le contenu commun montre en réalité que les Hindous ont aidé l’auteur du Baptême de Lumière, tout comme ils ont aidé Guénon.
René Guénon ne s’est jamais référé pour sa part au Swâmî Narad Mani de La France Antimaçonnique. Ils sont indépendants l’un de l’autre, et, en particulier, le premier n’a pas à répondre des affirmations et de l’expression du second, par exemple lorsque celui-ci utilise le terme spiritualisme. Guénon quant à lui dit nettement à propos de ce terme :
tout ce qu’on appelle « spiritualisme » ou « idéalisme » n’est-il, le plus souvent, qu’une sorte de matérialisme transposé ; cela n’est pas vrai seulement de ce que nous avons désigné sous le nom de « néo-spiritualisme », mais aussi du spiritualisme philosophique lui-même, qui se considère pourtant comme l’opposé du matérialisme. À vrai dire, spiritualisme et matérialisme, entendus au sens philosophique, ne peuvent se comprendre l’un sans l’autre : ce sont simplement les deux moitiés du dualisme cartésien, dont la séparation radicale a été transformée en une sorte d’antagonisme ; et, depuis lors, toute la philosophie oscille entre ces deux termes sans pouvoir les dépasser. Le spiritualisme, en dépit de son nom, n’a rien de commun avec la spiritualité ; son débat avec le matérialisme ne peut que laisser parfaitement indifférents ceux qui se placent à un point de vue supérieur, et qui voient que ces contraires sont, au fond, bien près d’être de simples équivalents, dont la prétendue opposition, sur beaucoup de points, se réduit à une vulgaire dispute de mots.
La Crise du Monde moderne, ch. VII.
Mais cette indépendance établie, il ne nous semble pas inintéressant d’aborder quand même les divers points sur lesquels on prétend les opposer ou les confondre, pour illustrer les procédés grossiers mis en œuvre.
2) Accusations contre le Swâmî
a) Un mystificateur ?
Dans la suite (p. 168), M. Toth dénonce un « silence, suspect sinon coupable », à propos de la « présentation du personnage de Narad Mani », et de son « caractère mystificateur », « évident ». On prend visiblement au premier degré la façon ironique dont est introduit le Swâmî (l’invocation par un mantram, la « voix caverneuse », le « coup de gong », jusqu’à la « clochette magique » qui sonne lorsque les feuilles de papier de l’étude tombent sur le parquet, « numérotées au crayon rouge »), alors que c’est évidemment fait pour moquer les méthodes de Blavatsky. L’auteur de la postface admet pourtant que « Narad Mani mentionne » « souvent » « avec sarcasme ce procédé frauduleux chez Mme Blavatsky » (p. 169), mais au lieu de voir la contradiction de son accusation, sa soi-disant « légitime indignation pour cette impudence se trouve renforcée ».
b) Un spirite ?
Si c’est d’abord Clarin de la Rive, le directeur de La France Antimaçonnique, qui est montré du doigt concernant cette pseudo-mystification, c’est au tour de René Guénon de se voir directement attaquer, responsable car « déjà, et même puissamment, présent » (?) dans la revue, coupable de « machiavélisme à base métaphysique » et également d’être « cynique ». Voici l’élaboration fantasmagorique qui nous est présentée : on part d’une révélation tonitruante, « une chose surprenante, voire choquante (L. de Maistre dit “déconcertante”) » (p. 170) : « Cette chose, la voici : Narad Mani, le pourfendeur de la Société Théosophique et de sa fondatrice, se révèle un défenseur convaincu du spiritisme ». Ce serait un plan des Supérieurs Inconnus pour compenser l’erreur du matérialisme, et ainsi se répéterait avec 64 ans de retard la création en 1848 du mouvement spirite, décrite par Guénon dans L’Erreur spirite. Nous aborderons peut-être en détail cette histoire abracadabrantesque dans un prochain article ; pour le moment nous nous contenterons de faire remarquer qu’elle est ruinée d’avance par ce qui suit, qui montre l’absurdité du postulat sur lequel elle repose.
Le Swâmî défend-il vraiment le spiritisme ? Rien n’est moins sûr. Laszlo Toth avance la « pure hypothèse » d’« une équivoque » sur le mot spiritualisme, qui serait peut-être « spiritualism astucieusement traduit » et pourrait alors être en fait égal à spiritisme ; puis il y a « une équivoque dans l’équivoque », que causeraient les rapports entre spiritualisme et matérialisme, qui mène… on ne sait où.
Cette affirmation hasardeuse a vraisemblablement été trouvée dans le livre de Louis de Maistre, L’énigme René Guénon et les Supérieurs Inconnus, qui lui n’est même pas équivoque, mais carrément contradictoire : p. 69, il est dit à propos du Swâmî que « son écrit s’élève contre les fondateurs de la S.T. au nom du spiritisme le plus vulgaire », « mais sans laisser transparaître le fond de sa pensée, à savoir s’il croit vraiment ou non à la communication des défunts avec les vivants ». En lisant l’étude du Swâmî, on constate en fait qu’il ne défend pas le spiritisme contre Blavatsky, mais qu’il dénonce simplement sa versatilité, son opportunisme, sa duplicité, en particulier dans son attitude par rapport aux spirites, qu’elle avait d’abord cherché à séduire en vantant leurs théories pour plus tard les dénigrer : « En même temps que Home s’attaque à Mme Blavatsky et que “John King” disparaît, voilà que l’ancienne magnétisée de Michal cesse d’être un médium et déclare avoir consacré sa vie entière, non plus au spiritisme et au spiritualisme, mais à l’étude de l’ancienne Kabbale, de l’Occultisme et des Sciences occultes. » (P. 84 du livre ; p. 540 de la revue, 25e année, no 50.) On notera au passage que, dans cette dernière citation, la distinction entre spiritisme et spiritualisme est nettement établie par le Swâmî.
On peut même penser qu’il n’était pas du tout spirite, puisque comme on l’a vu, il renvoie sans réserve au livre du Dr Gibier, « qui n’était nullement un spirite » (René Guénon, L’Erreur spirite, 1re partie, ch. IV).
Nous ne voyons pas particulièrement d’équivoque, mais une multiplicité d’usages du mot spiritualisme, dont le sens se déduit immédiatement dans le contexte. Par exemple, l’expression de « mouvement spiritualiste chrétien » (p. 49 du livre ; p. 480 de la revue, 25e année, no 44) désigne bien le mouvement spirite, mais le contexte dans lequel elle est employée et sa précision permettent aisément de ne pas faire la confusion avec les divers autres passages où le mot spiritualisme est employé dans d’autres sens. Il est vrai que Guénon a une terminologie plus précise, notamment par le recours à l’expression néo-spiritualisme, mais l’effort pour comprendre le Swâmî nous paraît tout à fait surmontable. Peu importe, le directeur d’Archè, qui en a besoin pour sa thèse, amalgame spiritualisme et spiritisme systématiquement, ce qui lui fait faire des anachronismes (p. 173, note 2, il parle du « spirit(ual)isme de Swedenborg », rajoutant de lui-même les parenthèses, alors qu’à l’époque de Swedenborg le spiritisme n’existait pas encore), et cela va jusqu’à lui faire déformer une citation de l’étude, p. 176 : « “On commença donc à parler de la possibilité d’une réconciliation entre la Science et le Christianisme, et même de l’unification possible des divers cultes chrétiens, quand, tout à coup, vers la fin de 1878, peu après la rupture du Grand-Orient de France [lorsque celui-ci abolit le G.'. A.'. D.'. L.'. U.'.] avec le Spiritualisme et la Franc-Maçonnerie Universelle” », pour isoler le premier terme du second et rattacher plus facilement le spiritualisme au spiritisme, alors que la citation réelle est « la rupture du Grand-Orient de France avec le Spiritualisme de la Franc-Maçonnerie Universelle » (p. 14 du livre ; p. 462 de la revue, 25e année, no 43), ce qui donne au contraire un exemple de passage où le mot spiritualisme est utilisé dans son sens philosophique, et ne peut alors aucunement être pris pour une mauvaise traduction de spiritisme.
En note de ce passage déformé, il est ajouté : « Pourtant, deux ans plus tôt, René Guénon dut “protester hautement contre une campagne encore plus ridicule qu’odieuse, menée depuis quelques temps contre cette dernière [la « Maçonnerie française » (dont parle Narad Mani) qui avait supprimé la formule A.'. L.'. G.'. D.'. G.'. A.'. D.'. L.'. U.'.], en France même, au nom d’un prétendu spiritualisme” », pour faire croire que Palingénius proteste alors contre le spiritisme. Voilà le passage complet :
On voit par là que l’orthodoxie maçonnique, telle que nous l’avons définie, est liée à l’ensemble du symbolisme envisagé comme un tout harmonique et complet, et non exclusivement à tel ou tel symbole particulier, ou même à une formule telle que A.'. L.'. G.'. D.'. G.'. A.'. D.'. L.'. U.'., dont on a voulu parfois faire une caractéristique de la Maçonnerie régulière, comme si elle pouvait constituer à elle seule une condition nécessaire et suffisante de régularité, et dont la suppression, depuis 1877, a été si souvent reprochée à la Maçonnerie française. Nous profiterons de cette occasion pour protester hautement contre une campagne encore plus ridicule qu’odieuse, menée depuis quelque temps contre cette dernière, en France même, au nom d’un prétendu spiritualisme qui n’a que faire en cette circonstance, par certaines gens qui se parent de qualités maçonniques plus que douteuses ; si ces gens, à qui nous ne voulons pas faire l’honneur de les nommer, croient que leurs procédés assureront la réussite de la pseudo-Maçonnerie qu’ils essayent vainement de lancer sous des étiquettes variées, ils se trompent étrangement.
Palingénius, L’Orthodoxie maçonnique, La Gnose, avril 1910 (et non « 1912 » comme dit dans la postface).
En réalité, à quoi est-il fait allusion précisément dans ce contexte ? Par les citations qui suivent, on voit, encore une fois, que ce n’est pas du tout le spiritisme. Mais cela n’a rien d’extraordinaire, on constate juste la diversité d’usages du mot spiritualisme :
l’expression « maçonnerie spiritualiste » ne correspond absolument à rien, attendu qu’elle n’est qu’une invention de certains occultistes.
René Guénon, La Kabbale juive, traduction du compte rendu paru en italien dans Ignis, 1925.
Quant à la prétendue Maç.'. de Papus, il est à peine besoin de dire que cela n’a aucune valeur ; vous savez d’ailleurs que les tentatives faites par Papus pour entrer dans la Maç.'. ont toujours échoué, même dans la L.'. dont son père faisait partie.
René Guénon à Patrice Genty, 21 octobre 1934.
Le F.'. Waite a accusé Papus et son école d’antimaçonnisme ; cela peut paraître exagéré à première vue, en ce sens qu’ils semblaient ne s’attaquer qu’au seul G.'. O.'. ; mais, quand on examine certaines choses de plus près, on doit reconnaître qu’il n’avait pas tort.
René Guénon à Maurice Gloton, 17 mai 1947.
c) Un pro-maçon ?
Ce qui est curieux, c’est que d’un côté, Laszlo Toth reproche au Swâmî d’être favorable à la Franc-Maçonnerie :
Le troisième (et dernier) point – de taille – est la façon de présenter la Maçonnerie en général et ses diverses obédiences en particulier.
Elle n’est jamais présentée sous une lumière négative, ou du moins critique, comme les lecteurs de la publication de Clarin de la Rive eussent pu à juste titre s’y attendre ; au contraire, souvent Narad Mani en offre une image en tous points respectable.
Elle n’est jamais présentée sous une lumière négative, ou du moins critique, comme les lecteurs de la publication de Clarin de la Rive eussent pu à juste titre s’y attendre ; au contraire, souvent Narad Mani en offre une image en tous points respectable.
Tandis qu’à propos de la pseudo-conversion de Taxil, il affirme contre l’évidence que c’est encore et toujours le spiritisme que le Swâmî croirait nécessaire de défendre, et non la Maçonnerie :
Concernant le spirit[ual]isme et le christianisme – tous deux objet [sic] des attaques de ce qu’il appelle la Doctrine de l’Ombre –, Narad Mani va jusqu’à y associer théoriquement « la fameuse conversion » de Léo Taxil « dont l’intention était de faire flèche lui aussi contre le Spiritualisme que Mme Blavatsky n’avait pu abattre ».
Le passage en question :
La Société des Recherches Psychiques déclara donc que Mme Blavatsky n’était qu’un véritable imposteur « coupable d’une combinaison longuement continuée avec d’autres personnes, en vue de produire, par des moyens ordinaires, une série d’apparentes merveilles pour le soutien du mouvement théosophique ».
Tromper est une nécessité blavatskienne
Ce coup d’assommoir, qui provoqua beaucoup de démissions nouvelles à Londres et fut bientôt cause de la ruine de la branche de Paris, eut cependant moins de retentissement dans la presse profane que n’en eut alors l’affiliation, au Grand-Orient de France, d’un anti-spiritualiste notoire, M. Ch. Bradlaugh, grand ami du F.'. prince Napoléon et de Mme Annie Besant, ou de la fameuse conversion du F.'. Léo Taxil, dont l’intention était de faire flèche, lui aussi, contre le Spiritualisme que Mme Blavatsky n’avait pu abattre.
Tromper est une nécessité blavatskienne
Ce coup d’assommoir, qui provoqua beaucoup de démissions nouvelles à Londres et fut bientôt cause de la ruine de la branche de Paris, eut cependant moins de retentissement dans la presse profane que n’en eut alors l’affiliation, au Grand-Orient de France, d’un anti-spiritualiste notoire, M. Ch. Bradlaugh, grand ami du F.'. prince Napoléon et de Mme Annie Besant, ou de la fameuse conversion du F.'. Léo Taxil, dont l’intention était de faire flèche, lui aussi, contre le Spiritualisme que Mme Blavatsky n’avait pu abattre.
P. 33 du livre ; p. 472 de la revue, 25e année, no 43.
Nous pouvons donc en conclure sur ce point que l’auteur du Baptême de Lumière est bien favorable à une Maçonnerie qu’il qualifie assez malencontreusement de spiritualiste, et cela montre encore son usage de ce terme dans un sens philosophique et non pour décrire les conceptions spirites.
d) Un anti-catholique ?
Enfin, et c’est ce que le directeur d’Archè semble considérer comme le feu d’artifice de la postface, le Swâmî Narad Mani serait ennemi du Catholicisme romain :
Malgré toutes ses affirmations ambiguës, dans une optique anti-blavatskyenne, Narad Mani laisse entrevoir sa véritable stratégie assez mal dissimulée : le vrai ennemi visé c’est le christianisme sous sa forme la plus structurée et la plus rigoureuse, à savoir le catholicisme romain. Le lecteur avisé de son texte aura remarqué que l’une des « Notes » s’intitule significativement « Les pires chemins conduisent à Rome » et se termine ainsi :
« Or, la superstition, la déception et l’imposture, contre lesquelles le Spiritualisme n’a jamais cessé de lutter, ont toujours été les marques distinctives du Satanisme, auquel, grâce à la prétendue Science matérialiste, on ne croyait plus généralement ; il s’ensuit donc que, tout en croyant se moquer du monde, la Société de Mme Besant – avec son Krishna-Murti d’un club à miracles et ses faux Mahatmas destinés à remplacer les saints du calendrier – est en train de continuer de plus belle à rétablir un des dogmes fondamentaux du Christianisme, qu’on s’était promis d’abattre. »
Mis à part son dépit pour un rétablissement d’un des dogmes fondamentaux du Christianisme, c’est par cet “on” que Narad Mani se trahit.
On croit rêver ! Ces propos n’ont pas été publiés n’importe où, mais dans La France Antimaçonnique, organe du Conseil Antimaçonnique de France !
« Or, la superstition, la déception et l’imposture, contre lesquelles le Spiritualisme n’a jamais cessé de lutter, ont toujours été les marques distinctives du Satanisme, auquel, grâce à la prétendue Science matérialiste, on ne croyait plus généralement ; il s’ensuit donc que, tout en croyant se moquer du monde, la Société de Mme Besant – avec son Krishna-Murti d’un club à miracles et ses faux Mahatmas destinés à remplacer les saints du calendrier – est en train de continuer de plus belle à rétablir un des dogmes fondamentaux du Christianisme, qu’on s’était promis d’abattre. »
Mis à part son dépit pour un rétablissement d’un des dogmes fondamentaux du Christianisme, c’est par cet “on” que Narad Mani se trahit.
On croit rêver ! Ces propos n’ont pas été publiés n’importe où, mais dans La France Antimaçonnique, organe du Conseil Antimaçonnique de France !
Voilà le passage complet :
Les pires chemins conduisent à Rome
Ni le Bouddhisme, ni le Christianisme, ni l’Islamisme, ni le Judaïsme, ni le Parsisme, ni le Shintoïsme, ni aucun des autres cultes religieux représentés en 1893 au Congrès de Chicago, n’a chargé M. Gyanendra N. Chakravarti de faire croire à sa Magnétisée qu’elle en était le trait d’union, de lui faire convertir la congrégation blavatskienne en Église dominant toutes les autres, de métamorphoser en Papesse l’ancienne camarade en athéisme du F.'. Bradlaugh, et d’envoyer la S.'.'. Besant à Paris, afin d’y exhiber son Krishna-Murti de café-concert.
Pour en finir avec cette « Missionnaire », il suffirait, croyez-le bien, de lui demander publiquement de qui elle tient ses « pouvoirs » et d’exiger d’elle la production de ses « titres ».
Le Spiritualisme a de tout temps cherché à libérer la Religion de la superstition, tandis que la Société dite Théosophique, avec ses Mahatmas en mousseline et ses faux miracles, n’a jamais cherché qu’à faire revivre les croyances superstitieuses.
À cette Société, née avec Mme Blavatsky pour « détruire le spiritualisme », pour répandre dans les pays chrétiens l’idée qu’« il n’y a pas de Dieu personnel ou impersonnel », pour « balayer le Christianisme de la surface de la terre », et pour affirmer avec Mme Besant qu’« être converti au Christianisme est plus mauvais que d’être un sceptique ou un matérialiste », – à cette Société-là, disons-nous, nul dans notre pays, à part les « lions et les aigles » que Mme Blavatsky convertissait « en ânes et en oies », ne peut accorder aucune espèce de crédit.
Le Krishna-Murti des employeurs taxiliens de Mme Besant, c’est l’application cynique de ce système de Mme Blavatsky : « Il est nécessaire de tromper les hommes pour les gouverner ».
Et ceci est si vrai, qu’à l’heure même où, en 1895, naissait ce soi-disant Messie, M. Herbert Burrows, le socialiste anglais bien connu, le vieil ami, le parrain de Mme Besant, annonçait publiquement qu’il quittait la Société Théosophique parce qu’il avait reconnu qu’elle était « un danger permanent pour l’honnêteté et la vérité et une perpétuelle porte ouverte à la superstition, à la déception et à l’imposture ».
Or, la superstition, la déception et l’imposture, contre lesquelles le Spiritualisme n’a jamais cessé de lutter, ont toujours été les marques distinctives du Satanisme, auquel, grâce à la prétendue Science matérialiste, on ne croyait plus généralement : il s’ensuit donc que, tout en croyant se moquer du monde, la Société de Mme Besant – avec son Krishna-Murti sorti d’un club à miracles et ses faux Mahatmas destinés à remplacer les saints du calendrier – est en train de continuer de plus belle à rétablir un des dogmes fondamentaux du Christianisme, qu’on s’était promis d’abattre.
Qui sait même si cela n’est pas à cause de cela que, de blavatskienne qu’elle était, la fille de Mme Besant s’est faite catholique-romaine ?
S’il n’y a pas de Religion plus haute que la Vérité, il est certain qu’il n’y en a pas de plus basse que la Fourberie.
D’où la nécessité, pour quiconque veut faire son choix, de connaître la vérité sur la Société dite Théosophique et de s’assurer si celle-ci n’a pas été établie, comme l’a prouvé le rapport d’Hodgson, par un des plus grands imposteurs de l’Histoire.
Ni le Bouddhisme, ni le Christianisme, ni l’Islamisme, ni le Judaïsme, ni le Parsisme, ni le Shintoïsme, ni aucun des autres cultes religieux représentés en 1893 au Congrès de Chicago, n’a chargé M. Gyanendra N. Chakravarti de faire croire à sa Magnétisée qu’elle en était le trait d’union, de lui faire convertir la congrégation blavatskienne en Église dominant toutes les autres, de métamorphoser en Papesse l’ancienne camarade en athéisme du F.'. Bradlaugh, et d’envoyer la S.'.'. Besant à Paris, afin d’y exhiber son Krishna-Murti de café-concert.
Pour en finir avec cette « Missionnaire », il suffirait, croyez-le bien, de lui demander publiquement de qui elle tient ses « pouvoirs » et d’exiger d’elle la production de ses « titres ».
Le Spiritualisme a de tout temps cherché à libérer la Religion de la superstition, tandis que la Société dite Théosophique, avec ses Mahatmas en mousseline et ses faux miracles, n’a jamais cherché qu’à faire revivre les croyances superstitieuses.
À cette Société, née avec Mme Blavatsky pour « détruire le spiritualisme », pour répandre dans les pays chrétiens l’idée qu’« il n’y a pas de Dieu personnel ou impersonnel », pour « balayer le Christianisme de la surface de la terre », et pour affirmer avec Mme Besant qu’« être converti au Christianisme est plus mauvais que d’être un sceptique ou un matérialiste », – à cette Société-là, disons-nous, nul dans notre pays, à part les « lions et les aigles » que Mme Blavatsky convertissait « en ânes et en oies », ne peut accorder aucune espèce de crédit.
Le Krishna-Murti des employeurs taxiliens de Mme Besant, c’est l’application cynique de ce système de Mme Blavatsky : « Il est nécessaire de tromper les hommes pour les gouverner ».
Et ceci est si vrai, qu’à l’heure même où, en 1895, naissait ce soi-disant Messie, M. Herbert Burrows, le socialiste anglais bien connu, le vieil ami, le parrain de Mme Besant, annonçait publiquement qu’il quittait la Société Théosophique parce qu’il avait reconnu qu’elle était « un danger permanent pour l’honnêteté et la vérité et une perpétuelle porte ouverte à la superstition, à la déception et à l’imposture ».
Or, la superstition, la déception et l’imposture, contre lesquelles le Spiritualisme n’a jamais cessé de lutter, ont toujours été les marques distinctives du Satanisme, auquel, grâce à la prétendue Science matérialiste, on ne croyait plus généralement : il s’ensuit donc que, tout en croyant se moquer du monde, la Société de Mme Besant – avec son Krishna-Murti sorti d’un club à miracles et ses faux Mahatmas destinés à remplacer les saints du calendrier – est en train de continuer de plus belle à rétablir un des dogmes fondamentaux du Christianisme, qu’on s’était promis d’abattre.
Qui sait même si cela n’est pas à cause de cela que, de blavatskienne qu’elle était, la fille de Mme Besant s’est faite catholique-romaine ?
S’il n’y a pas de Religion plus haute que la Vérité, il est certain qu’il n’y en a pas de plus basse que la Fourberie.
D’où la nécessité, pour quiconque veut faire son choix, de connaître la vérité sur la Société dite Théosophique et de s’assurer si celle-ci n’a pas été établie, comme l’a prouvé le rapport d’Hodgson, par un des plus grands imposteurs de l’Histoire.
P. 67 du livre ; p. 531 de la revue, 25e année, no 49.
Nous n'avons pas vu en quoi ce texte pouvait être anti-catholique, au contraire.
De quel dogme fondamental parle-t-on ?
« Un des dogmes fondamentaux du Christianisme », « qu’on s’était promis d’abattre », « grâce à la prétendue Science matérialiste » : c’est « le Satanisme », dont « les marques distinctives » sont « la superstition, la déception et l’imposture ».
Il est courant de dire qu’une des ruses du diable est de faire croire qu’il n’existe pas : c’est simplement ce qui est dit ici, ainsi que le fait qu’il est trahi, remis au jour, par les méfaits de la Société Théosophique. Le Swâmî étant opposé au matérialisme, il est évident, pour qui en douterait encore, que par on il ne désigne pas sa propre personne, mais ses adversaires.
L'expression « Les pires chemins mènent à Rome » elle-même n’est pas plus hostile au Catholicisme que l'expression « le diable porte pierre », à laquelle elle nous semble assez analogue.
Conclusion
On a vu que non seulement René Guénon et le Swâmî Narad Mani sont indépendants l’un de l’autre, mais qu’en outre les attaques diverses contre le Swâmî, qui n’ont aucun enjeu en elles-mêmes mais seulement pour viser Guénon plus ou moins directement, sont dénuées de tout fondement.
À la fin de sa postface, Laszlo Toth donne une confirmation supplémentaire de sa cible principale, concluant ainsi le livre :
N’oublions pas que quelques mois plus tard seulement se déchaîna la polémique sur les « Supérieurs Inconnus », avec René Guénon en tête.
Tout cela est simplement scandaleux et l’on en vient à croire qu’à côté des « bien étranges antimaçons » dont parlent plusieurs polémistes, il faut ranger aussi des publications antimaçonniques bien étranges. »
Tout cela est simplement scandaleux et l’on en vient à croire qu’à côté des « bien étranges antimaçons » dont parlent plusieurs polémistes, il faut ranger aussi des publications antimaçonniques bien étranges. »
Ceci fait allusion à l’emploi par Le Sphinx de l’expression qui est plus exactement « des antimaçons bien étranges » (dans les articles de La France Antimaçonnique : À propos des Supérieurs Inconnus et de l’Astral, puis dans « L’Énigme ») ; « plusieurs » est rajouté pour qu’on soit sûr qu’il est bien visé, car il n’est pas le seul à l’avoir employé : c’est le rédacteur d’un article des Cahiers Romains qui l’avait fait en premier.
On constate que L. Toth ne fait aucune différence entre les différentes signatures de Guénon, tentant de l’attaquer par Le Sphinx, alors que Guénon encore vivant disait lui-même, désinvolte, dans les comptes rendus de revues du Voile d’Isis de février 1933 :
Dans le numéro de décembre [de la Revue Internationale des Sociétés Secrètes], nous trouvons un article fantaisiste qu’on a cru spirituel d’intituler Entretiens d’Œdipe ; si on savait combien cela nous est égal, et comme certaines allusions qui veulent être perfides sont loin de nous toucher… d’autant plus loin que ceux de nous qu’elles prétendent viser sont morts depuis bien longtemps !
A fortiori, comment ses ennemis espèrent-ils l’atteindre aujourd'hui ?
P. S.
Concernant cette postface, peut-être que le sujet avait déjà été traité à l’époque mais nous n’en avons pas eu connaissance, n’ayant trouvé qu’un compte-rendu complaisant de Jérôme Rousse-Lacordaire, dans Politica Hermetica no 18, Ésotérisme et guérison, 2004, p. 173, où sont résumés tous les mensonges de la postface :
Signalons au passage une bizarrerie : il est parlé de « l’auteur anonyme de la postface ». Pourtant Laszlo Toth signe la préface de ses initiales, et son identité semble publique, ici par exemple :
Ce n’est donc pas pour protéger son identité.
Il est même cité comme correspondant de Politica Hermetica pour l’Italie, p. 4 du même ouvrage :
Et il occupe apparemment cette fonction depuis au moins 1987, et M. Rousse-Lacordaire est dans le comité de rédaction depuis 1996, il serait donc un peu étonnant qu’ils ne se connaissent pas :
Est-ce pour dissimuler l’obéissance à un même mot d’ordre ? Nous ne prétendons pas répondre à cette question, nous contentant de signaler ce fait curieux. Mais si on se laissait tenter, on pourrait y voir de bien étranges collusions entre les milieux universitaires et de l’édition, où anti-occultistes et occultistes s’entendent étonnamment bien pour sortir la grosse artillerie contre l’œuvre de René Guénon.
Bonjour, juste une note rapidement qui me semble peut servir:
RépondreSupprimerl'auteur se présente comment étant membre "De la Confrérie de la Vérité Vraie" d'Adyar (1) ; en effet, c'est dans la banlieue de Chennai que Blavatsky en 1883 installa le H.Q (Head Quarter) de son groupe; précisément dans le quartier d'Adyar. Si en effet cette organisation (1) est inconnue au bataillon ; le jeu de mots quant à lui ne l'est pas.
Bonjour,
RépondreSupprimerMerci, c'est possible.
Bonjour,
RépondreSupprimerje voudrais savoir, s'il est possible, où je peux trouver la publication de la lettre de Guénon à Luc Benoist du 2 juillet 1934 à propos de sa rencontre avec Swâmî Narad Mani.
Merci de votre attention.
Bonjour,
RépondreSupprimerElle n'est pas encore publiée, j'ignore quand elle le sera.
Bonjour,
RépondreSupprimerpour rebondir sur ce point, d'ailleurs je trouve ceci, assez étonnant: de faire référence dans un écrit quelqu'il soit à des documents inaccessibles ; sans même au moins un extrait qui permettrait de comprendre le contexte ;
car nous avons vu souvent et trop souvent des choses rapportées "sous la forme de qu'en-dira-t-on" et quand on peut enfin lire le texte, l'on s'aperçoit qu'il s'agit d'autre chose, voir totalement d'autre chose.
Si j'avais un avis, je préférais qu'un auteur ne mentionne pas, ce qu'il ne peut ou ne veut pas montrer, quelqu'en soit les raisons, cela éviterait peut-être la diffusion d'idées fausses basées sur des on-dit de on-dit, dont n'est pas sur d'où ils viennent et qui aurait affirmé ou n'aurait pas.
J'entend bien que la correspondance de René Guénon est d'ordre privée, mais dans ce cas? pourquoi la mentionner pour "illustrer" un propos?
Bonsoir,
RépondreSupprimerS'il y a malheureusement si peu de correspondance éditée à l'heure actuelle, ce n'est pas de mon fait. Pour les extraits cités, ce n'est pas du qu'en dira-t-on, mais des citations exactes, avec référence précise. Et c'est le contraire de ce que vous accusez, puisque ce sont les extraits donnés qui contribuent à rendre la correspondance publique.
L'extrait en question me semble suffisamment clair pour nécessiter un extrait plus grand. Pour prendre un exemple, un extrait problématique a été commenté ici :
http://oeuvre-de-rene-guenon.blogspot.fr/2015/02/edition-et-signatures.html
Même en n'ayant que la citation tronquée, il était possible de distinguer ce qui dépendait d'un contexte (les recommandations) de ce qui n'en dépendait pas.
Qu'est ce qui selon vous est dépendant d'un contexte et qui peut prêter à confusion dans les passages rapportés ici ? Quels sont donc les détails concrets qui vous mettent dans un tel état, jusqu'à vouloir interdire de rendre publique toute correspondance inédite ?
Pour avoir des informations complémentaires quant au contexte, on peut consulter le lien suivant, où l'extrait évoqué peut être retrouvé dans des citations plus larges :
RépondreSupprimerhttp://oeuvre-de-rene-guenon.blogspot.fr/2015/06/nouvelle-publication-le-sphinx-recueil.html
Bonjour tagada, il y a un bail qu'on s'est parlé depuis le forum LLPien! Je voudrais que tu saches que je viens de découvrir ton site et que j'apprécie ton travail, je trouve ça très intéressant et utile.
RépondreSupprimerEn passant, comme tu sais Rudolf Steiner est un de mes guides, et il a parlé à quelques reprises d'un certain C.G.Harrison (du courant anglo-catholique) qui a consacré une conférence (mise en texte sous le titre "The Transcendental Universe", disponible sur balderexlibris) à une critique et appréciation occultiste chrétienne (anti-réincarnation) de la Soc. Théosophique issue des travaux de Blavatsky et de Sinnett. Dans l'intro de l'ouvrage de Harrison réédité par les anthroposophes, il est question du phénomène spirite et des loges qui seraient responsables de ce phénomène artificiel. Il est notament question des critiques guénoniennes et même du Swami dont tu parles sur cette page. Je conseillerais d'y jeter un oeil si tu lis la langue de Shakespeare...
Bonne continuation
Druide
Bonjour Druide,
RépondreSupprimerMerci bien, oui ça fait longtemps en effet, je me souviens de toi, il y avait aussi "Auda" qui était steinerien. Ca me fait me souvenir que ce forum était assez varié question fréquentations à l'époque.
C'est en rapport avec ton message ici ?
http://novusordoseclorum.discutforum.com/t5327-ouvrages-de-rene-guenon-introuvables-retranscrits-en-texte-a-partir-de-scans-le-theosophisme-l-erreur-spirite-autres#77979
Je ne sais pas si le "Swâmî Narad Mani" de La France Antimaçonnique a pompé sur Harrison, c'est possible, d'après le présent article en tout cas il n'y a pas de raison d'en tenir Guénon comme responsable (ni même le vrai Swâmî Narad Madi).
Merci de l'indication. Le titre donné est un peu différent, mais j'ai l'impression que c'est de cette étude dont parle Guénon ici :
"Un ouvrage intitulé The Transcendental World, par C. G. Harrison, qui parut en Angleterre en 1894, semble contenir des allusions à ce fait et à l’antagonisme qui exista depuis lors entre la H. B. of L. et la Société Théosophique ; mais les informations qu’il contient relativement aux origines occultes de cette dernière ont un caractère trop fantastique et sont trop dépourvues de preuves pour qu’il nous soit possible d’en faire état."
Le Théosophisme, ch. II, note 11.
J'ai parcouru la préface vite fait, trouvé quelques allusions à Guénon, mais je n'ai pas vu où était mentionné le Swâmî.
Pour les origines du spiritisme, c'est la H. B. of L. qui s'en attribuait elle-même la création. Je ne crois pas qu'elle soit d'origine maçonnique.
Merci, bonne continuation à toi.
Re-bonjour Tagada,
RépondreSupprimerLe lien que je t'ai fourni contient le livre de Harrison, plus une introduction écrite par l'anthroposophe Christopher Bamford, assez calé en occultisme. L'intro affirme, comme tu dis, que la HBL est clairement la source du phénomène spirite en Occident. L'intro est très intéressante. Il est question dans les notes de fin de texte du Swami Narad Mani (p.194, note 16, les notes sont de Chris Bamford) sur qui on sait peu de choses à part le fait que Guénon s'y référait. Le Swami serait une source importante en ce qui concerne les dénonciations de Guénon publiées dans Le Théosophisme. Steiner n'avait pas tout à fait confiance en Harrison, celui-ci étant lié aux initiés de la High Church of England, mais reconnaissait que ce dernier a révélé des choses exactes avant tout le monde sur le phénomène spirite et certaines erreurs du Théosophisme. Les occultistes élitistes de la High Church of England avait intérêt à attaquer et maintenir cachées certaines vérités avancées (plus ou moins correctement) par les théosophistes.
Druide
Rebonjour Druide,
RépondreSupprimerPour la H. B. of L. source des phénomènes spirites, c'étaient ses enseignements mêmes qui l'affirmaient (L'Erreur spirite, partie I, ch. II).
"Il est question dans les notes de fin de texte du Swami Narad Mani (p.194, note 16, les notes sont de Chris Bamford) sur qui on sait peu de choses à part le fait que Guénon s'y référait. Le Swami serait une source importante en ce qui concerne les dénonciations de Guénon publiées dans Le Théosophisme."
Merci, c'est bien le passage que tu cites dans le lien de forum que j'ai signalé au message précédent et auquel je répondais. En réalité le "Swâmî Narad Mani" de la FAM n'était qu'un pseudonyme et son auteur ne connaissait rien à la tradition hindoue (contrairement à Guénon en 1912), ce qui est cohérent avec le fait que Guénon disait n'être pour rien dans les publications sous cette signature, mais ce dernier disait également que c'étaient des hindous qui l'avaient aidé pour Le Théosophisme (ce que n'était pas l'auteur du Baptême de Lumière). Si les deux textes ont des éléments en commun, c'est donc qu'ils avaient une source commune (les hindous que désigne Guénon), et non qu'un a été repris sur l'autre. C'est ce que j'ai expliqué dans l'article ci-dessus, partie 1. Le fait que l'auteur du Baptême de Lumière ait repris un morceau de texte de Harrison n'implique donc aucunement Guénon.
Mais c'est intéressant de constater que cette attaque a été faite encore d'un côté supplémentaire à ceux que je cite dans l'article ci-dessus. Tu sais si Godwin est steinerien, ou théosophiste ?
Cher tagada,
RépondreSupprimerIl me semble que Godwin est clairement un Théosophiste, mais relativement indépendant puisqu'il réfère aussi à Steiner (alors que ce dernier est presque toujours rejeté des milieux théosophistes) et il est parfois même cité par certains anthroposophes. Godwin n'est généralement pas conseillé par les anthroposophes (voire déconseillé quant à certains aspects de sa pensée), mais c'est l'un des seuls à s'être penché (dans "The Hidden Hand") sur les racines du mouvement spirite plongeant dans certaines sociétés semi-secrètes telles que la HBL. À moins que je me trompe (c'est du moins ce que suggère Harrison), c'est par lui qu'on sait que le prétendu Swami a littéralement recopié des bouts du livre d'Harrison, un fait que je n'ai pu vérifier cependant, ne possédant pas le livre du Swami. Cela dit, tu sembles maîtriser le sujet bien mieux que moi.
J'ai noté qu plusieurs anthroposophes ont reconnu à Guénon la validité de sa référence à une ancienne guerre occulte déclarée par les kshatriyas (pouvoir temporel) contre les brahmanes (pouvoir spirituel) comme point d'origine de la Contre-initiation (ou peut-être de la Contre-Tradition, je ne suis pas sûr). L'auteur de l'intro au livre de Harrison, Chris Bamford, adhère à cette notion, non seulement dans cette intro mais aussi dans d'autres intros pour des recueils de conférences de Steiner, notamment celui sur la Communauté des chrétiens (Petite digression: la Communauté des chrétiens est une organisation fondée par des prêtres et clairement distincte et séparée de la Société anthroposophique, bien qu'elle ait demandé et reçu des indications précises de Steiner afin de réformer le culte chrétien. La Société anthroposophique se relie au courant ésotérique de l'occultisme-gnose et non au courant exotérique de la communauté pastorale chrétienne.)
Bonne continuation,
Druide
Cher Druide,
RépondreSupprimerOk merci. C'est quand même assez remarquable que des gens si différents considèrent unanimement l'auteur du Baptême de Lumière comme hindou (qu'ils soient de bonne foi ou non). Je ne connais pas ce texte tant que cela, je l'ai juste lu une fois, mais à sa lecture on constate forcément le contraire. Il est désormais accessible sur internet ici :
http://www.iapsop.com/archive/materials/la_france_antimaconnique/
Pour le passage cité par Godwin, il est dans ce numéro, p. 1, colonne 2 :
http://www.iapsop.com/archive/materials/la_france_antimaconnique/france_antimaconnique_v25_n43_oct_26_1911.pdf
"Quelques mois plus tard, un élève de Swedenborg, Alph. Cahagnet, avait publié ses Arcanes de la vie future dévoilée, et, à partir de 1848, sous une impulsion donnée par un Centre occulte, le fait de la communication avec l'invisible avait recommencé à être étudié un peu partout, le plus souvent dans des centres privés, et au moyen de personnes d'une organisation psychique particulière appelées médiums.
Jusqu'en 1870, des expériences plus ou moins bien conduites, plus ou moins sincères, avaient eu lieu ; puis, après la guerre Franco-Allemande, la Société Dialectique de Londres, à la suite d'une enquête sérieuse, avait publié son Rapport sur le Spiritisme. Enfin, les découvertes faites par le célèbre savant William Crookes étaient venues étonner tout le monde."
Peut-être que je n'ai pas vu le bon passage, le seul que j'aie trouvé dans le livre de Harrison qui y ressemble un peu est pp. 84-85 :
"It was admitted on all hands that something must be done, but the party of secrecy were averse to a straightforward policy of tentative elementary instruction. "Let us proceed cautiously," they said in effect, "and endeavor to ascertain indirectly how far the public is disposed to receive such instruction." Accordingly experiments were made, first in America, then in France, and afterward in England, with certain individuals of a peculiar psychical organization, since called mediums. But the whole thing was a failure. The mediums, one and all, declared that they were controlled by spirits who had departed from the earth. "It was just what might have been expected," said those who are always wise after the event, but, in point of fact, no one had expected it. I can only account for this strange oversight by the fact that "the children of this world are wiser in their generation than the children of light." The occultists were like the man in the fable who was so absorbed in the contemplation of the stars that he walked into the ditch at his feet."
Si c'est bien ce passage, je ne sais pas ce que tu en penses, je trouve que c'est assez faible, en somme il n'y a pas toute la phrase, mais juste la fin de similaire (7 ou 8 mots), et je ne vois pas l'intérêt de copier juste ce passage. Enfin possible que ce soit de la recopie, mais ça n'est pas bien compromettant, même là j'ai l'impression que l'accusation porte à faux.
Ah d'accord, merci pour ces indications. C'est la contre-initiation, pour la contre-tradition c'est censé en être l'extériorisation finale avec l'antéchrist.
Merci, bonne continuation à toi.
C'est sûrement ce passage, ces quelques mots. On peut en douter, mais à mon avis cela indique ou bien comme tu dis une source commune du "Swami" (1911) et de Harrison (1895) (hypothèse), ou bien que le "Swami" s'est un peu inspiré -sans le mentionner- des conférences d'Harrison parues 15 ans plus tôt. Ce qui m'apparaît curieux, c'est que Guénon semble accorder du crédit au Swami mais pas du tout à Harrison alors qu'on voit que le Swami s'est manifestement inspiré du travail d'Harrison publié lontemps avant. Le phrasé le trahit bel et bien à mon avis:
RépondreSupprimer"Accordingly experiments were made, first in America, then in France, and afterward in England, with certain individuals of a peculiar psychical organization, since called mediums."
"(...)le fait de la communication avec l'invisible avait recommencé à être étudié un peu partout, le plus souvent dans des centres privés, et au moyen de personnes d'une organisation psychique particulière appelées médiums."
On parle de plagiat pas seulement lorsqu’une phrase complète est copiée, ça peut aussi être seulement un bout de phrase. Mais il ne faut pas voir ça comme un simple plagiat, à mon avis ce qui importe c'est que cela est une indication qu'il faut creuser et poser des questions. Peut-être que ça ne mènera nulle part... C’est ce que j’aimerais savoir.
Je me demande pourquoi le Swami n'a pas voulu admettre la source (Harrison ou source commune). Je suis curieux quant au jugement de Guénon sur le caractère "fantaisiste" de Harrison, dont on sait tout de même quelque chose (notamment le fait qu’il a vraiment existé), alors que d'autre part Guénon réfère au Swami dont on ne sait pratiquement rien, et qui n'a peut-être jamais existé autrement que comme nom de plume (pour qui? et pour quoi?).
Druide
(Suite) La raison qui fait que je m'intéresse à ce qui m'apparaît être une présence occultée des propos de Harrison dans des écrits du Swami et dans l’analyse de Guénon va au-delà de la question de la fabrication artificielle du phénomène spirite par certains groupes occultes. C'est que Steiner a référé à Harrison plusieurs fois dans des contextes que je trouve très intéressants. Harrison est en lui-même très intéressant, très intriguant, mais aussi très mystérieux, surtout en ce qui concerne ses sources, car Steiner dit que ce gars était l'un des rares à avoir parlé ouvertement des plans à long terme (voire à très long terme) qui ont court dans certaines loges secrètes liées au monde anglo. Par exemple, Steiner cite Harrison pour expliquer la Première guerre mondiale et la révolution bolchévique. (Ça ressemble au complotisme anti-maçonnique de base, mais ça n'est pas aussi simple car ça vient de gens qui prennent l'occultisme, ou la « magie théorique » chrétienne ésotérique comme dit Harrison, comme une voie sérieuse, un peu comme Guénon qui n’est pas un banal complotiste anti-maçon.) Steiner résume ainsi le propos d'Harrison sur la Grande Guerre et la révolution en Russie: dans certaines loges du monde anglo-saxon, qui se croient responsables de la bonne marche du monde et qui croient que celle-ci dépend de l’hégémonie mondiale du modèle anglo, de la même façon que les peuples germaniques d'autrefois ont été élevés dans leur état d’enfance par la nourrice romaine, le latinisme. Dans la pensée de telles loges, c’est le monde anglo et son modèle (surtout pas l’Allemagne) qui doit servir de tuteur à la Russie et au monde slave en tant que ceux-ci constituent le premier bourgeon d’une race future mais encore à l’état de bébé. Harrison affirme que dans cette optique, une grande guerre était planifiée dès la fin du 19e siècle dans certains cercles occultes (il dit cela en 1895!), une grande guerre par laquelle de grands bouleversements politique ébranleraient l'Europe (par exemple l‘établissement de Républiques) et par laquelle l'Allemagne serait écartée et réduite à un rien du tout, à un néant. Selon ce plan tout rapprochement entre la Russie et l'Europe du centre devait être empêché par tous les moyens. D'où l'appui de ces loges anglos à la révolution en Russie et avant ça, au panslavisme/panrussianisme qui a rendu possible l'alliance anglo-franco-russe contre l'Allemagne.
RépondreSupprimerVoilà, je pense que j'ai fait le tour de ce que je peux apporter. Si tu as des questions, je devrais être en mesure d'aider, mais à voir ta maîtrise du sujet je crois que tu es tout à fait en mesure de trouver par toi-même les réponses à tes questions.
Druide
Non je n'ai pas parlé de source commune de Harrison et de l'auteur du Baptême de lumière, il est très possible que celui-ci ait copié sur celui-là, enfin en comparant les deux passages incriminés je constate juste que l'accusation de plagiat ne va pas très loin. Golwin a dû éplucher les deux textes fébrilement pour tomber sur ce "résultat", et se rendant compte lui-même que c'était peu probant il a pris un passage bien plus large dont la majorité ne correspond pas du tout, ce qui fait de lui un falsificateur si Bamford le cite exactement (la citation serait identique au mot près).
RépondreSupprimerCe que je dis (et que j'estime être plus qu'une hypothèse) c'est que Guénon et l'auteur du Baptême de lumière (qui n'est pas le vrai Swâmî Narad Mani, et n'est même pas hindou) ont utilisé une même source qui est hindoue.
"le Swâmî Narad Mani a d’ailleurs existé, car je l’ai connu, mais je pense que, dans la circonstance, il n’a fait que donner sa signature ; en tout cas, je ne suis pour rien là-dedans."
René Guénon à Luc Benoist, 2 juillet 1934.
« l’idée de ce livre nous avait été depuis longtemps suggérée par des Hindous, qui nous ont d’ailleurs fourni une partie de notre documentation. »
René Guénon, Le Théosophisme, notes additionnelles.
J'ai indiqué ces deux citations plus haut. D'autre part Guénon a été membre de la H. B. of L., il n'avait pas besoin d'Harrison ou d'une autre source documentaire pour savoir ce qui s'y passait.
Concernant l'occultisme, Guénon disait que cela n'était pas sérieux (cf. par exemple L'Erreur spirite, partie I, ch. V), il explique longuement ce qu'est la tradition au sens réel de ce mot et ce que cela doit impliquer. Quant à la contre-initiation, si elle devait administrer des loges comme la Maçonnerie elle aurait été découverte publiquement depuis longtemps, et elle n'a pas une nationalité, anglaise ou autre, mais selon les époques les différentes nations peut servir d'instrument plus ou moins direct à celle-ci, à leurs propres dépens. En fait, l'état nation en tant que tel est par nature manipulable, il n'a pas de direction intérieure (sa raison d'être repose en gros sur ses défenses matérielles) et j'ai l'impression qu'il est condamné à être instrumentalisé par des forces cachées. D'autre part on voit que des contre-initiés comme Crowley ont tour à tour collaboré avec l'Angleterre et l'Allemagne, ce qui suggère bien qu'ils se servent des nations plutôt que d'en servir une.
Pour les prévisions de la guerre, oui c'est intéressant, mais outre qu'on doit pouvoir trouver des tas d'auteurs avec leur propre prévision et que quoi qu'il se soit passé on aurait toujours pu trouver quelqu'un avoir raison a posteriori, la guerre devait sembler prévisible à l'époque, il y avait déjà eu celle de 1870 qui n'était pas conclue, et concernant la seconde guerre mondiale j'ai déjà lu des lettres de gens qui dans le courant des années 30 parlaient de la guerre comme de quelque chose de très probable, je suppose que c'est le cas à chaque guerre, les détails sont durs à prévoir, mais on voit le conflit de manière générale arriver de loin.
Concernant la nécessité de tenir à l'écart la Russie du reste de l'Europe, je crois que c'est Brzezinski qui le dit explicitement dans Le grand échiquier, je ne nie pas que cela doit faire partie de stratégies politiques. Mais de toute façon je ne crois pas que cette perspective se situe plus haut que dans le domaine économique. Si l'Allemagne avait été ou était plus forte du fait d'une alliance économique à la Russie, serait-elle plus traditionnelle pour cela ?
Merci de tes précisions en tout cas concernant Steiner et Harrison.